Hubert Reeves

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Émission du 11 décembre 2004

Nous poursuivons aujourd'hui nos réflexions inspirées de l'histoire de la vie sur la Terre.

Depuis près de 4 milliards d'années, notre planète héberge des êtres vivants : à partir de cette observation fondamentale, nous nous sommes interrogés sur les conditions géologiques et astronomiques nécessaires à une telle permanence.

Aujourd'hui, nous abordons un autre facteur : la composition chimique de l'atmosphère. Son influence sur la température, par le biais de l'effet de serre, est de toute première importance.

Sans atmosphère, Vénus, plus proche du Soleil que nous, serait à vingt degrés Celsius. En fait grâce à l'effet de serre engendré par son atmosphère dense, riche en gaz carbonique, Vénus est à 480° Celsius.

L'atmosphère initiale de la Terre était vraisemblablement composée surtout de gaz carbonique et, dans une incertaine mesure, de méthane et d'azote, sans oxygène libre.

Puisque nous connaissons l'existence en continu de la vie sur notre planète, nous pouvons déjà conclure que, contrairement à l'exemple de Vénus, l'effet de serre provoqué par ces gaz n'a jamais été suffisamment puissant pour évaporer la totalité des nappes liquides indispensables à l'éclosion et au maintien des différentes formes de vie.

Par le fait que certaines bactéries aient développé des moyens de récupérer l'énergie du rayonnement solaire par photosynthèse, elles ont pris, dans le passé, un rôle majeur dans la composition de l'atmosphère. En effet, la photosynthèse, c'est l'absorption de gaz carbonique et le rejet d'oxygène. L'atmosphère s'appauvrit peu à peu en gaz carbonique et s'enrichit en oxygène. Ce gaz s'accumula et devint progressivement un constituant très important dans l'atmosphère terrestre, tandis qu'une couche d'ozone protectrice s'installait par transformation de l'oxygène produit par les plantes. Cela, il y a environ deux milliards d'années.

Aujourd'hui, la concentration de gaz carbonique est devenue très faible : moins de 1 % (environ 0,3 %).

À cause de notre activité industrielle, en particulier des combustions de charbon et de pétrole, cette concentration s'est mise à augmenter rapidement, et nous nous inquiétons des effets de cette évolution sur la biosphère. Pourtant, la concentration de gaz carbonique, au temps des dinosaures par exemple, a été beaucoup plus élevée qu'aujourd'hui. Les températures étaient alors d'une dizaine de degrés supérieures à la valeur présente.

Nous connaissons mal les causes de ces élévations de concentration de ce gaz dans le passé. S'agissait-il d'expulsions massives liées aux perturbations importantes du magma interne : éruptions volcaniques, épanchements de ce gaz enfermé dans des couches souterraines et délivré par des tremblements de terre ? Nous n'en savons rien.

De même, des éjections de méthane, autre gaz à effet de serre, pourraient avoir considérablement influencé la température superficielle de notre planète.

Ces variations, à la fois de la concentration des gaz à effet de serre et de la température, ont vraisemblablement joué un rôle important dans l'évolution de la vie. Des espèces végétales et animales ne pouvant s'y adapter ont disparu. D'autres ont survécu, des mutations ayant eu lieu, et la vie s'est maintenue. La permanence de la vie sous toutes ses formes durant cette longue histoire montre que les perturbations atmosphériques n'ont jamais eu raison de la prodigieuse robustesse de la vie sur la Terre.

Note du webmestre :

Cette chronique, effectivement programmée à l'origine pour le 11 décembre 2004, a été diffusée en réalité le 25 décembre 2004, rattrappant ainsi les « erreurs » des 11 et 18 décembre. Nous la faisons néanmoins apparaître ici sous la date du 11 décembre 2004, afin de respecter la chronologie initialement prévue.