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Publié le 18 novembre 2013 dans Le Point.fr

L’astrophysicien appelle à faire pleinement reconnaître le statut d'« êtres sensibles » aux animaux sauvages.

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Hubert Reeves, président de l’association Humanité et Biodiversité. © Éric Piermont / AFP

L’association Humanité et Biodiversité que je préside œuvre à faire pleinement reconnaître le statut d'« êtres sensibles » aux animaux sauvages, statut pour le moment reconnu aux seuls animaux domestiques. Bien entendu, nous nous sommes associés à la Fondation 30 millions d’amis qui œuvre à faire sortir ces derniers de la catégorie des « meubles », comme c’est encore le cas dans le Code civil de Napoléon toujours en vigueur.

Certaines personnes se sont montrées surprises de l’intérêt et des efforts accordés à une telle entreprise à l’heure où de très graves problèmes concernent des êtres humains. Deux événements de ma vie m’ont fait comprendre que, loin d’être futile, ce projet se situe dans une mouvance très contemporaine qui justifie d’y accorder la plus grande attention.

« Ça ne se fait pas » : tels sont les mots qui accompagnent une transformation sociale de cette importance. Il ne s’agit pas ici, bien sûr, d’une réforme en profondeur des psychismes individuels, mais d’une évolution assez superficielle, qui, pourtant, suffit souvent à transformer les us et coutumes.

De telles réformes sont évidemment d’une grande fragilité. Des bouleversements sociaux suffisent parfois à tout remettre en cause. L’histoire du IIIe Reich allemand est un exemple. Les pulsions les plus sombres se libèrent quand elles ne sont plus, pour diverses raisons, socialement condamnées. Mais cela ne dure qu’un temps, ainsi le Reich s’effondre et la réprobation universelle se concrétise à nouveau avec les procès de Nuremberg.

Sur ce sujet, je conseille au lecteur le livre The Better Angel of Our Nature de Steve Tinker aux éditions Viking / Allen Lane - 2011. Cet auteur démontre, documents à l’appui, que depuis l’Antiquité la violence entre les humains est en diminution régulière et que, malgré les guerres, les génocides et autres meurtres, le XXe siècle est celui qui a fait le moins de victimes proportionnellement à la population mondiale. Difficile à croire, mais les chiffres sont bien là !

Pourtant, d’autres actes ignominieux — dont les génocides récents et le traitement de femmes lapidées — peuvent sembler remettre en cause la valeur de cette vision d’espoir en l’avenir de l’humanité. Il n’en reste pas moins que ces comportements sont aujourd’hui quasi universellement réprouvés. Je me suis plu à l’idée qu’on pouvait y voir un progrès dans le comportement des humains.

Quel rapport y a-t-il entre tout cela et le projet de changer le statut juridique des animaux dans le Code civil ?