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Trop d’hygiène n’est pas bon pour la santé !

Publié le 29 novembre 2013 dans Le Point.fr

Nous avons tort de vouloir vivre dans un monde trop aseptisé. Les microbes stimulent le système immunitaire des enfants et les protègent contre les allergies.

Fermier Amish
Les Amish, qui vivent dans des fermes sans sanitaires, sans électricité et sans eau courante, sont nettement moins sensibles aux allergies que partout ailleurs aux USA. © Karen Bleier / AFP

Défendre la biodiversité, c’est aussi reconnaître nos alliés et nos ennemis dans les populations microbiennes qui coexistent avec nous et dont notre santé et notre bien-être dépendent. Qui voudrait sauver les virus de la malaria ou de la polio ?

Des études récentes ont mis en évidence l’accroissement prodigieux des allergies et des asthmes dont souffrent aujourd’hui les populations et en particulier les enfants. Les recherches pour identifier les causes de ces accroissements ont apporté des résultats tout à fait étonnants dans le contexte de nos habitudes d’hygiène dans nos appartements aseptisés.

Un premier résultat vient des populations amish des États-Unis où les pourcentages de personnes sensibles aux allergies sont très nettement inférieurs (dix fois !) que partout ailleurs aux USA. Et qui sont les Amish ? Des populations qui fuient la vie moderne, qui vivent sur des fermes sans sanitaires, sans électricité et sans eau courante. Ce phénomène surprenant porte le nom « effet de la ferme ». Il est avéré dans beaucoup d’autres contextes.

Rien n’est simple !

Les chercheurs qui ont réalisé cette étude donnent leurs conclusions : « Ce sont les microbes présents dans les étables, les débris végétaux et le lait cru qui stimulent le système immunitaire des enfants et les protègent contre les allergies. » Voilà donc une population microbienne que nous aurions tort de vouloir éliminer. Nous devons au contraire la mieux connaître pour l’intégrer dans notre défense de la biodiversité.

Faut-il pour autant abandonner nos mesures d’hygiène ? Certes non ! Elles ont joué un rôle fondamental dans la décroissance radicale de la mortalité infantile au cours des deux derniers siècles. Mais il faut savoir identifier nos amis et nos ennemis. Utiliser les antibiotiques, mais limiter les mesures antiseptiques. Une étude suédoise conseille aux parents de lécher les tétines des bébés plutôt que de les faire bouillir. Ce qui permet à la flore microbienne d’aller coloniser les nouveaux organismes. Une autre étude montre que les gens qui vivent entourés de plantes ont une plus grande variété de bactéries sur la peau et présentent des risques plus faibles d’allergie. Les maisons les mieux isolées thermiquement et donc plus écologiques présentent une diversité fongique (de champignons microscopiques) plus faible et moins favorable à la protection contre l’asthme. Comme toujours, rien n’est simple !

Sources d’inspiration pour ce billet :