Hubert Reeves

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Lettre éditoriale du 17 décembre 2005

Paris, le 17 décembre 2005.

Aux arbres

Chers amis,

Souvent lorsque des petits enfants dessinent la maison de leurs rêves, la maison est accompagnée d'un arbre. Parfois les arbres sont très nombreux et l'enfant les dessine les uns au-dessus des autres, et même au-dessus de la maison. Les arbres ont toujours eu beaucoup d'importance pour moi. Ils en prennent de plus en plus.

Et pour leur rendre hommage, je vous propose des extraits du poème « Aux arbres » de Victor Hugo dans « Les contemplations » :

Arbres de la forêt, vous connaissez mon âme !
Au gré des envieux, la foule loue et blâme ;
Vous me connaissez, vous ! - vous m'avez vu souvent,
Seul dans vos profondeurs, regardant et rêvant.
Vous le savez, la pierre où court un scarabée,
Une humble goutte d'eau de fleur en fleur tombée,
Un nuage, un oiseau, m'occupent tout un jour.
La contemplation m'emplit le cœur d'amour.
Vous m'avez vu cent fois, dans la vallée obscure,
Avec ces mots que dit l'esprit à la nature,
Questionner tout bas vos rameaux palpitants,
Et du même regard poursuivre en même temps,
Pensif, le front baissé, l'œil dans l'herbe profonde,
L'étude d'un atome et l'étude du monde.

Arbres de ces grands bois qui frissonnez toujours,
Je vous aime, et vous, lierre au seuil des autres sourds,
Ravins où l'on entend filtrer les sources vives,
Buissons que les oiseaux pillent, joyeux convives !

Forêt ! c'est dans votre ombre et dans votre mystère,
C'est sous votre branchage auguste et solitaire,
Que je veux abriter mon sépulcre ignoré,
Et que je veux dormir quand je m'endormirai.

Amicalement,

Signature d'Hubert Reeves